Lettre Anonyme #1 : 15 Février
- Traumas Podcast
- 20 oct.
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Dernière mise à jour : il y a 3 jours
Tard le soir… ce genre de nuit où l’air lui-même semble lourd de menaces.
Le ciel était d’un gris d’acier, le vent hurlait, si froid qu’il arrachait des larmes aux coins des yeux. Tu te souviens de ce froid?
Moi, je ne l’oublierai jamais.Il s’est imprimé dans ma peau, jusque dans mes os.
Ça m’a pris un an.
Douze mois.
Cinquante-deux semaines.
Trois cent soixante-cinq jours.
Quatre cent trente-six bières.
Bien plus de whisky que je ne veux bien l’admettre.
Peut-être deux cent cinquante paquets de cigarettes.Tu sais ce que ça veut dire, pas vrai?ÇA VEUT DIRE QUE JE SUIS TOUJOURS VIVANTE.
J’essaie parfois d’imaginer ce que serait la « moi » du 15 février 2006 si tu n’avais jamais croisé ma route. J’aurais toujours mes blessures intérieures, mes doutes, mes peurs des relations humaines… ça, ce n’est pas de ton fait.
Mais il y a des choses que je n’aurais jamais sues.
Si tu ne m’étais pas arrivé, je ne saurais pas…
Je ne saurais pas ce que ça fait de vouloir tuer quelqu’un.
Je ne connaîtrais pas la peur, la haine pure et aveugle.
Je ne saurais pas que je pouvais me sentir aussi seule, aussi vulnérable.
Je ne saurais rien de la méchanceté, de la violence volontaire.
Je ne saurais pas que les monstres se déguisent en humains pour piéger les filles.
Si tu ne m’étais pas arrivé, je n’aurais jamais su ce que c’était de supplier la mort, de la prier d’en finir. Je n’aurais jamais su ce que ça fait d’être tuée… puis ramenée à la vie deux secondes plus tard, juste pour être tuée encore.
Mais ce soir-là m’a prouvé une chose : je suis une héroïne.
Pas l’héroïne des films. Pas une figure parfaite.
Mais une héroïne réelle, cabossée, fatiguée, vivante.
Depuis, j’ai appris à cohabiter avec mes monstres. Ils ne dorment jamais vraiment, mais j’ai cessé d’en avoir honte. J’ai cessé de me croire coupable.J’ai toujours peur.
Peut-être plus qu’avant. Mais ma peur est devenue une arme : elle m’a rendue plus prudente, plus vigilante, plus combative.
Je n’ai plus peur de mourir.
J’ai même découvert la vengeance.
J’ai pensé à toi, des nuits entières.
À la façon dont je pourrais te faire payer.
À ton visage déformé par la peur.
J’ai imaginé tes suppliques et ma victoire.
Ça a duré quelques mois. Puis c’est tombé. Parce que la vengeance, en vérité, ne libère pas. Elle enchaîne.
Aujourd’hui encore, parfois, je pense à toi.
Trop souvent. Je me demande : où es-tu? Avec qui vis-tu? Seul? Avec ta fille? Chez tes parents? Et ta mère… sait-elle quel monstre est devenu le petit gars qu’elle a mis au monde? Et si tu avais une sœur? Tu serais sûrement ce grand frère protecteur prêt à tuer quiconque lui ferait du mal. Quelle ironie. Quelle hypocrisie.
Moi, je continue. Je ris, je mange, je danse, j’embrasse, je fais l’amour, je crée, je rêve. J’existe. JE VIS. Tu ne m’as pas brisée.
Je refuse de laisser le 15 février devenir une date de deuil. Non.
Avant, c’était mon anniversaire… Simplement.
Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de ma renaissance… Du jour où je suis revenue à la vie.
Le jour où j’ai appris à dire non, à m’échapper, à survivre. Auteur : Anonyme


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